Insolite : l’enfant et la sirène

Ce film ne vous dit peut-être rien, et pour cause, il n’a jamais fini d’être tourné. Un jour, Néjad Atzamba décide de faire un film d’animation entièrement tourné sous l’eau. Pour cela, entre 1963 et 1965, un petit village est construit à quelques pas du sémaphore d’Antibes. Seulement, le réalisateur n’aura jamais de budget pour réaliser son rêve, et le petit village sous-marin est resté tel quel, dorénavant devenu la demeure des poissons. Aujourd’hui, habité seulement par… des poissons, coraux et étoiles de mer. À plusieurs mètres sous la surface de la mer, non loin du sémaphore d’Antibes, c’est en effet une petite Atlantide d’environ 1000 m² qui s’offre en spectacle aux plongeurs, avec son salon de coiffure, son hôtel, ses commerces, ses rues, ses statues, sa cathédrale. Il s’agit là des vestiges d’un film d’animation des années 60… qui ne vit pas le jour.

UN RÊVE CINÉMATOGRAPHIQUE JAMAIS DEVENU RÉALITÉ

« A l’époque, nous avions tous une grande admiration pour lui, car il travaillait, parallèlement à ses études, à un projet d’animation qui devait révolutionner le « dessin animé », comme on disait alors, et faire trembler les assises de la production de Walt Disney elle-même! En 1967, je le rencontrai par hasard dans le midi, où nous passions des vacances. On ne s’était pas revus depuis 1949 et je lui donnai notre adresse, à Paris. J’eus l’agréable surprise de le voir rappliquer à la Scala, en cette fin d’année 67 où on était passés au café théâtre. J’appris que Néjad était toujours fidèle à son projet, mais qu’il avait encore, après tant d’années, de grosses difficultés d’argent. Il resta à Paris pas mal de temps et vint régulièrement assister aux spectacles, auxquels il prenait beaucoup d’intérêt. Puis, un jour, il disparut, en nous laissant quelques photos-maquette de cette animation. Depuis, je ne me console pas de ce gâchis d’un talent énorme qui ne sortira plus jamais de l’oubli ! ».

Le peu de sources tout-à-fait fiables contraint au conditionnel. Il semblerait que le projet ait d’abord choisi le site de Cap Dramont, dans la baie d’Agay, non loin de Saint-Raphaël (Var). Sous le pseudo « hyppoc », un homme qui dit avoir participé au projet témoigne : « à Le Dramont [sic], nous n’avons pu établir que (environ) 100 m² sur les 1000 prévus au départ pour cause de dégradations ». Une certaine « PMK » évoque des « conditions de mer de visibilité » qui aurait contraint déménager le plateau sous-marin « vers Cannes », ce qui correspondrait donc au site du cap d’Antibes. Les plongeurs, du reste, continuent à visiter ce qui pourrait avoir été le premier lieu choisi, au cap Dramont. Mais c’est donc vraisemblablement au cap d’Antibes que se trouverait la plus grande « ville sous-marine », d’une superficie totale d’environ 1000 m², par 10 à 30 mètres de fond. D’après un document transmis par la Maison du tourisme EPIC de Vallauris Golfe-Juan, la descente des quelque 200 constructions (maisons, ponts, obélisques, cimetière, remparts, édifices d’inspiration médiévale, romaine ou égyptienne…), soit 15 tonnes de matériaux, aurait nécessité 6 ans et 7000 plongées ! En vain, puisque le projet n’aboutira jamais.

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